Pourquoi CLE Autistes?

Nous sommes une association loi 1901 organisée par des militant.e.s, bénévoles, organisateurs/trices et activistes autistes, et nous accueillons les allié.e.s de notre cause qui ne s’approprient pas notre combat et notre parole.

Cette association est née dans un contexte où l’expression des personnes autistes quels que soient leurs modes de communications (parlante, comportementale, écrite, corporelle, artistique…), se voit  ou se trouve dénigrée, rejetée et combattue par certains groupes d’influence ayant longtemps eu le monopole de la communication sur le thème de l’autisme. Certains d’entre nous se sont donc rassemblés, au départ grâce aux réseaux sociaux.

La liberté d’expression des personnes autistes se trouve menacée. Nous devons résister, continuer à faire valoir ce droit élémentaire, ainsi que nos droits fondamentaux.

Les associations actuelles pour l’autisme ne répondent pas à nos besoins, encore moins à nos attentes (défense des droits, lutte contre l’exclusion et les discriminations). La plupart d’entre elles ne sont pas gérées par des personnes autistes dans leur conseil d’administration. Quand c’est le cas, leur expression est limitée et/ou contrôlée par autrui (parents, professionnels de santé…).

De nouvelles formes d’organisation, indépendantes des associations gestionnaires et des associations de parents sont devenues possibles grâce aux réseaux sociaux. Un nouveau militantisme pour le handicap émerge, dénonçant le caractère inefficace et contre-productif de ces portes paroles, qui s’expriment sans légitimité au nom de tous et toutes.

Fort de ce constat, CLE Autistes prétend défendre les idées qui sont les nôtres, et les droits des personnes autistes en matière d’émancipation et de vie autonome.

    – Ensemble, nous sommes forts et nous pouvons nous soutenir.

    – Ensemble, nous pouvons permettre à d’autres autistes, psychiatrisé.e.s ou institutionnalisé.e.s, de s’exprimer à leur tour.

    – Nous refusons de vivre dans le silence et la peur.

Nous devons nous unir, et au-delà de nos clivages, de nos différences, agir ensemble.

Le but de CLE Autistes est de défendre les droits des personnes autistes en matière d’émancipation et de vie autonome.

L’autisme et les handicaps cognitifs/psys sont inclus dans les revendications du manifeste et l’association est ouverte à des initiatives communes avec d’autres mouvements de personnes handicapées.

Nos revendications

1/ L’Auto-représentation :

Notre slogan est “Rien pour nous sans nous”.

Les personnes autistes doivent avoir accès à toutes les formes de communication possibles et accessibles.

En tant que citoyens français, nous voulons être représentés dans tous les domaines de la société, y compris les médias.

Nous produisons notre propre connaissance sur notre fonctionnement cognitif et sensoriel et la médecine ne peut pas en avoir le monopole.

Les personnes autistes doivent être impliquées dans les politiques publiques qui les concernent, les initiatives publiques ou privées et la recherche scientifique.

Les personnes autistes doivent être traitées de manière ordinaire dans les médias, avec une représentation qui reconnaît leur individualité et leur diversité.

Les personnes autistes ne sont pas des leçons de vie pour les personnes valides et ne doivent pas devoir adopter des standards pour être incluses dans la société.

Nos droits sont des obligations et non des options.

Nous ne voulons pas être qualifiés de personnes ayant des dons ou des aptitudes fantastiques.

Nous voulons le droit d’expérimenter nos erreurs et choisir notre propre vie.

Nous n’avons pas à justifier notre handicap pour vivre et obtenir nos droits.

2/ La désinstitutionnalisation et la vie autonome

Nous défendons l’inclusion totale des personnes autistes en demandant la fin des établissements spécialisés pour les autistes et les personnes handicapées, et de toutes les structures qui administrent leur vie scolaire, professionnelle et personnelle.

Ce système paternaliste et ségrégatif est contraire aux droits internationaux et européens (Convention de l’ONU – CRDPH). L’institutionnalisation est une forme de discrimination qui viole les libertés fondamentales des personnes autistes et qui les sépare de la société. Elle est souvent contrôlée par des associations privées, sans regard extérieur, ce qui peut entraîner des abus et des violations de droits.

Nous revendiquons pour les personnes autistes le droit à l’autodétermination, c’est à dire faire leurs propres choix, définir leurs propres besoins et prendre leurs propres décisions avec l’aide nécessaire et sans contrôle extérieur.

Ce système institutionnel est basé sur une conception de l’autonomie qui est exclusivement masculine et de classe supérieure. En réalité, tout le monde est interdépendant et personne n’est vraiment autonome, car certaines personnes bénéficient du travail et de l’assistance des autres, tels que les tâches ménagères majoritairement accomplies par les femmes et les services de base fournis par les personnes des milieux populaires et/ou racisé.e.s. Ainsi, la dépendance est une construction sociale basée sur l’incapacité de se conformer à une norme valide et sur des tâches peu valorisées socialement.

Nous ne considérons pas que le besoin d’aide quotidienne pour les soins personnel (hygiène, habillement, alimentation) constitue une dépendance, tant que cela permet de mener une vie autonome et de réaliser ses aspirations. Nous considérons également que les personnes autistes doivent pouvoir choisir librement et de manière consensuelle leur aide personnelle, peu importe leurs buts.

Nous exigeons des politiques fortes pour la désinstitutionnalisation des personnes autistes et handicapées, y compris la dépsychiatrisation de toute personne enfermée dans des hôpitaux psychiatriques :

  • La dépsychiatrisation des personnes enfermées en séjour de longue durée dans les hôpitaux psychiatriques est une priorité, ainsi que la mise en œuvre d’une politique d’inclusion sociale pour les intégrer dans la société.
  • Les établissements spécialisés doivent être transformés en services communautaires de proximité pour les personnes autistes et leurs familles.
  • Les hôpitaux de jour TSA peuvent offrir des équipes mobiles d’accompagnement à domicile et travailler dans les écoles. Le système scolaire doit être inclusif et adapté aux besoins de chaque élève.
  • La société doit être accessible aux handicaps non-physiques pour garantir les droits fondamentaux des personnes autistes.
  • Il n’y a pas d’autistes sévères, mais des personnes autistes ayant des besoins d’accompagnement conséquents.
  • La mise sous tutelle et la privation de capacité juridique doit être abolie et remplacée par un système assisté pour leur permettre de faire leurs propres choix.

L’institutionnalisation n’est pas inévitable ou une nécessité malheureuse en raison de capacités réelles ou supposées. Cela est un résultat du manque de responsabilité politique des gouvernements envers les personnes handicapées.

Pour respecter l’égalité et la non-discrimination, il est de la responsabilité des autorités de financer des alternatives :

  • Les fonds doivent être directement distribués aux familles et aux personnes concernées plutôt qu’à des gestionnaires d’associations, pour qu’ils puissent choisir leur propre vie et leur propre accompagnement sans conditions.
  • Ces politiques de désinstitutionalisation devraient être élaborées avec les personnes autistes et ayant des handicaps non-physiques pour construire un nouvel ensemble de services. Les MDPH pourraient être gérées de manière plus participative, en partie par les personnes concernées.
  • Nous ne voulons pas l’inclusion professionnelle à tout prix, nous sommes conscients que toutes les personnes autistes ne peuvent pas travailler. C’est pourquoi des aide financières doivent être fournies pour couvrir leurs besoins et leur permettre de vivre dignement en choisissant leur propre activité.

3) La lutte contre les traitements forcés :

  • Nous demandons la suppression des séjours de longue durée en psychiatrie et la mise en place d’une psychiatrie démocratique.
  • La loi de santé mentale doit être révisée pour abolir les soins sans consentement et les abus psychiatriques, ainsi que les pratiques de contention, d’isolement et de médication abusifs.
  • Nous devons inclure la prévention des violences sexuelles sur les personnes autistes dans les politiques de prévention.
  • La protection de l’enfance doit être réformée pour éviter les placements abusifs et l’école doit inclure un programme pour lutter contre les maltraitances.
  • Nous luttons contre l’exploitation et la maltraitance au travail, ainsi que contre interventions et les pseudo-médecines prétendant guérir ou améliorer l’autisme.

 4) L’inscription de notre combat dans le mouvement de la neurodiversité :

  • La neurodiversité est la diversité des cerveaux et des esprits, avec une infinie variété de fonctionnements neurocognitifs. Cela signifie qu’il y a autant de cerveaux et de fonctionnements cognitifs que de personnes sur Terre. C’est un état de fait qui ne peut être remis en question.
  • En tant que mouvement pour l’égalité et la justice sociale, la neurodiversité affirme que toutes les conditions neurologiques méritent le même respect et les mêmes droits.
  • Le mouvement de la neurodiversité vise à éliminer les inégalités entre les personnes neuroatypiques et non pas à opposer les neurodivergents et les neurotypiques. Tout le monde est neurodivers mais tout le monde n’est pas neurodivergent.
  • Les personnes autistes et les personnes neurodivergentes sont confrontées à des injustices et des discriminations structurelles en raison des barrières imposées par la société. Le mouvement de la neurodiversité vise à permettre à toutes les personnes de participer de manière égale à la société, peu importe leur neuroatypicité.

5) La lutte contre le validisme/neurocapacitisme/psychophobie et les discriminations

  • Le modèle social du handicap considère le handicap comme une situation construite politiquement et culturellement par les normes de la société, et non pas comme une déficience individuelle. Cela est lié à un rapport de pouvoir inégal entre les personnes valides et non-valides, qui mène à l’oppression et à la discrimination.
  • L’autisme est également considéré comme une construction sociale, qui a produit une stigmatisation et une marginalisation des personnes autistes.
  • Les personnes autistes développent leurs propres stratégies de survie, et les personnes non-autistes ne peuvent pas juger leur condition.
  • Il est important de lutter contre le validisme et le sanisme, qui sont des systèmes de domination qui produisent et légitiment l’exclusion des personnes en dehors d’une norme fonctionnelle supposée.
  • Les personnes autistes et neurodivergentes subissent ces formes de domination, qui les privent de leur capacité d’agir et favorisent des attitudes condescendantes et paternalistes.
  • Les discriminations conduisent à considérer les besoins en aide des personnes autistes et handicapées comme une dépendance et un fardeau pour les autres.
  • Le modèle social du handicap appelle à l’inclusion sociale, à l’égalité des droits et à la reconnaissance de la diversité humaine.Il vise à déconstruire les stéréotypes négatifs associés au handicap, et à encourager les personnes autistes et ayant un handicap non-physique à développer leur plein potentiel.

C’est pourquoi notre objectif à terme est l’abolition du validisme et du sanisme sur toutes ses formes (institutionnelles, culturelles, interpersonnelles etc…) :

  • Nous ne considérons pas la validation et la neurotypie comme des objectifs en soi et ne pensons pas qu’il est important de les atteindre. Nous considérons que toutes les formes d’expression et de communication sont égales et les personnes autistes n’ont pas besoin d’adopter le même mode de communication que les neurotypiques si cela est néfaste pour leur fonctionnement et leur bien-être.
  • Nous rejetons toutes les politiques inspirées de l’eugénisme qui favorisent les recherches scientifiques basées sur les causes de l’autisme et des troubles neurodéveloppementaux (génétiques et biologiques) au lieu de se concentrer sur les causes de la stigmatisation sociale des personnes autistes et sur les solutions pour améliorer leur qualité de vie.
  • La psychanalyse, qui occupe une place importante dans le système médico-social français, doit être combattue en raison de son validisme, de son sanisme, de sa promotion de l’institutionnalisation et de son approche insuffisante pour comprendre l’autisme.
  • Ces revendications ne sont pas basées sur l’identité mais sur une communauté de pensée et nous reconnaissons que les personnes autistes éduquées dans une culture validiste peuvent adopter les préjugés qui les concernent et adhérer à ces représentations.
  • La lutte contre ces discriminations implique évidemment l’accessibilité et l’égalité des droits pour toutes les personnes autistes et en situation de troubles cognitifs (déplacements, école, université, services publics, loisirs, sport, culture, travail).

6/ La solidarité et l’inscription dans les mouvements sociaux

Les personnes autistes sont opprimées par les neurotypiques qui prennent des décisions pour elles sans leur consultation.

Les conditions neurologiques et les besoins des personnes autistes sont utilisés pour justifier leur exclusion et leur mise à l’écart.

Le combat pour l’émancipation des personnes autistes doit être inclusif et prendre en compte toutes les formes d’oppression que peuvent subir les personnes autistes.

Les personnes autistes peuvent également subir des discriminations en fonction de leur genre, du capitalisme, de leur sexualité, de leur religion, etc. Leur lutte est incompatible avec le patriarcat, le racisme, l’islamophobie, etc.

Les besoins en assistance des personnes autistes ne doivent pas se faire au détriment des conditions de vie de leurs accompagnant.e.s et la lutte doit également être menée contre leur précarisation. Les personnes autistes en prison, SDF, âgées, de classe populaire et précaires ne doivent pas être oubliées.

La neurodiversité et l’autisme sont des sujets politiques qui doivent être abordés de manière sociale et le mouvement d’émancipation des personnes autistes doit être affilié à des mouvements progressistes et sociaux. Les discours stigmatisants et hiérarchisants sont incompatibles avec nos combats.

CLE Autistes et ses militants et militantes